Peut-il exister des actions altruistes ?
Peut-il exister des actions altruistes ?
Peut-il exister des actions altruistes ?

Crédits

Plusieurs mains qui se serrent sur un fond multicolore.

🔗 GrumpyBeere. Licence Pixabay.

Peut-il exister des actions altruistes ?

Deux personnes avec un parapluie à la main pour aider autrui.
Source de l’image : 🔗 https://www.alderan-philo.org/activite/web-cafe-philo-peut-il-exister-des-actions-altruistes/
ThèmePeut-il exister des actions altruistes ?
AnimationUPP ALDERAN
Date et horairesle mardi 19 novembre 2024 de 20 h 30 à 22 h 30
Mots-cléscafé, débat, altruisme, solidarité, coopération, intérêt, motivation, égoïsme, relations interpersonnelles, autrui, groupe, société
InformationPour plus de détails sur le fonctionnement de l’événement, voir la page sur le WEB café philo.
Je suis adhérente de l’association UPP ALDERAN à Toulouse.

Introduction

Ce WEB café philo est un café philo « en ligne », « sur le web » où les participant·es se retrouvent dans une réunion Zoom à débattre sur un sujet connu à l’avance. Il constitue le premier café philo en ligne animé par l’association UPP ALDERAN car d’autres cafés philo existent en présentiel, comme le café philo Victor Schoelcher à Toulouse.

Le sujet du débat du jour porte sur l’altruisme, plus exactement sur les actions altruistes :

Peut-il exister des actions altruistes ?

WEB Café philo, UPP ALDERAN, mardi 19 novembre 2024.

Oui ou non ? Pour répondre, les participant·es ont durant le débat apporté des précisions sur des définitions, développer des idées, discuter de concepts avoisinants dont je partage dans cet article certains éléments de réponse.

1. Mon contexte personnel sur le thème de l’altruisme

Ce thème constitue une question de société importante à mes yeux car elle concerne les relations interpersonnelles, le vivre-ensemble. Je m’y suis intéressée en me documentant avec la lecture d’un livre et l’écoute d’une conférence.

1.1. L’entraide. L’autre loi de la jungle.

Voici deux liens sur ce livre L’entraide, l’autre loi de la jungle de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle. Je possède les deux versions dans ma bibliothèque.

Couverture recto du livre 'L'entraide, l'autre loi de la jungle'.

Je partage plusieurs extraits de l’ouvrage (version brochée) me semblant pertinents pour ce café-débat.

1.1.1. Quelques mots de la préface d’Alain Caillé

De cette vaste synthèse, la leçon essentielle qui se dégage, à l’inverse de tous les darwinismes primaires (que ne partageait nullement Darwin lui-même…), est que, en matière d’évolution, la clé du succès n’est pas la lutte pour la vie, mais bien plutôt l’entraide. Ou, pour le dire plus précisément, selon la formulation de deux biologistes théoriciens de l’évolution, David S. et Edward O. Wilson (eh oui ! Edward Wilson, l’inventeur de la sociobiologie, dont on constatera qu’il a radicalement inversé son propos initial, au grand dam de ses adeptes et disciples) : « L’égoïsme supplante l’altruisme au sein des groupes. Les groupes altruistes supplantent les groupes égoïstes. Tout le reste n’est que commentaire. » Ou encore : dans l’ordre du vivant, des sociétés bactériennes aux sociétés humaines, la coopération est hiérarchiquement supérieure à la compétition.

L’entraide, l’autre loi de la jungle. Alain Caillé, préface, page 13 (version brochée).

1.1.2. La compétition, un mythe toujours d’actualité

Connaissez-vous cette histoire ? C’est un mythe des années 1980, mais on dit qu’il vient d’une époque bien plus lointaine. Il était une fois la vie, une arène impitoyable où des millions de gladiateurs se battaient et s’entretuaient. Pas de cadeaux, pas de quartier, pas de pitié. L’agressivité était devenue un atout essentiel, c’était une question de survie. Dans ce monde, l’intelligence – pardon, la ruse – servait à passer devant les autres, ou, mieux, à les enfoncer. Il fallait surveiller ses arrières. « Que le meilleur gagne ! » entendait-on à l’envi. Le grand mangeait le petit, le plus rapide mangeait le plus lent, le plus fort mangeait le plus faible. C’était comme ça depuis la nuit des temps, disaient les sages. Si vous ne faisiez pas partie des gagnants, c’était pas de chance. D’ailleurs, c’était sûrement un peu de votre faute… « Bon sang ! Relevez-vous, battez-vous ! Gagner ! Réussir ! Vous ne comprenez donc pas ? » Ce mythe a la vie dure. On dit qu’il se raconte encore de nos jours, un peu partout dans le monde. Entre employés pour grimper dans la hiérarchie des organisations, ou entre ces dernières pour conquérir des parts de marché. On raconte que, au plus haut niveau de l’État, c’est l’obsession de la compétitivité, ou la bataille pour la conquête du pouvoir. Ailleurs, c’est la lutte entre les équipes de foot, les candidats aux grandes écoles, les demandeurs d’emploi… Bien entendu, ce ne sont pas de vraies guerres ; elles sont simulées, cathartiques, parfois théâtrales. Il paraît qu’elles canalisent les pulsions humaines pour nous empêcher de sombrer. Mais empêchent-elles les vrais affrontements, délits, crimes, conflits armés, guerres des classes, guerres des peuples ou guerres contre le vivant ?

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 17 (version brochée).

1.1.3. La loi de la jungle

La loi de la jungle : Si vous observez les êtres vivants (les « autres qu’humains ») à travers ce filtre, celui de la compétition, le tableau vous sautera aux yeux : le lion mange l’antilope, les chimpanzés s’entretuent, les jeunes arbres jouent des coudes pour l’accès à la lumière, les champignons et les microbes ne se font pas de cadeaux. Le mythe se déploie à la lumière de cet univers impitoyable. L’état de nature est synonyme de chaos, de lutte, de pillage et de violence. C’est la loi de la jungle, la « loi du plus fort », la « guerre de tous contre tous », selon l’expression d’un des pères du libéralisme, le philosophe Thomas Hobbes.

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 18 (version brochée).

Depuis le siècle dernier, la culture occidentale, moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. L’entraide ? Mais qui y croit encore ? Parfois elle resurgit miraculeusement, à la faveur d’un fait divers exceptionnel relaté au 20 Heures ou dans une vidéo animalière sur Internet visionnée des millions de fois. Fascinant !

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 19 (version brochée).

1.1.4. Kropotkine, le prince anarchiste à contre-courant

C’est aussi et surtout un clin d’œil au grand géographe et anarchiste Pierre Kropotkine, l’un des pionniers de cette aventure scientifique, qui écrivit en 1902 une remarquable synthèse dont le titre, Mutual Aid, fut traduit par son ami, le non moins géographe et anarchiste Élisée Reclus, par « entr’aide », mot qu’il offrit à la langue française.

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 27 (version brochée).

1.1.5. Les grands principes de l’entraide

Les grands principes de l’entraide
L’entraide est partout, depuis la nuit des temps, de manière bien plus claire que nous ne l’imaginions au départ de cette recherche.
L’entraide acquiert sa puissance en milieu hostile. Il en découle un avantage compétitif : elle permet de mieux survivre aux menaces. L’entraide ne saurait être pensée sans prendre en compte les différents niveaux d’organisation, ce qui peut être résumé par la phrase de D.S. Wilson et E.O. Wilson : « Au sein d’un groupe, l’égoïsme supplante l’altruisme, les groupes altruistes supplantent les groupes égoïstes, tout le reste n’est que commentaire. »
L’entraide atteint des niveaux exceptionnels chez l’être humain : elle est puissante, profondément ancrée en nous, peut se déployer à très grande échelle, mais reste souple (haute sensibilité aux conditions extérieures grâce à l’épigénétique et à la culture).
L’entraide est une force puissante, mais fragile et parfois dangereuse, qui apparaît dans des conditions bien précises, et qui disparaît ou devient toxique (pathologies, fermetures, etc.) lorsque les conditions ne sont plus réunies.
L’entraide se déploie dans le monde vivant sous de nombreuses formes et couleurs (symbiodiversité), à la fois dans les mécanismes et dans les chemins évolutifs qui la font émerger. L’architecture de l’entraide (y compris humaine) ressemble donc à des poupées russes où chaque poupée supérieure est plus complexe, et où les différentes tailles de poupées peuvent coopérer entre elles. L’ensemble de ces poupées forment un réseau de réseaux multicolores en perpétuelle évolution.
L’entraide est la principale source d’innovation du vivant, à toutes les échelles, depuis l’apparition de la vie. C’est la clé de la diversification du vivant, et l’un des piliers de la sélection naturelle.
Enfin, la compétition trouve sa place dans ce cadre. Elle reste le deuxième grand pilier de la sélection naturelle, permet de renforcer l’entraide entre organismes et sert aux organismes à délimiter leurs territoires ou à faire connaître leurs besoins. Mais elle est coûteuse en énergie et risquée, ce qui la rend hasardeuse lorsqu’il s’agit de s’engager dans une « lutte pour la vie » efficace et durable.

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 288 (version brochée).

1.1.6. Un schéma cyclique culture de l’entraide / culture de l’égoïsme

Voilà donc un schéma cyclique qui se dessine, et qui pourrait expliquer l’enchaînement des naissances et des morts de civilisations : par le passé, un monde hostile et pauvre a fait émerger une culture de l’entraide (sinon, nos ancêtres n’auraient pas survécu) ; cette culture de l’entraide a changé le rapport au monde, favorisant l’innovation et la création d’abondance ; ce monde d’abondance a fini par créer une culture de l’égoïsme (on n’a plus besoin de son prochain) ; et cette culture de l’égoïsme a tout détruit, recréant un monde hostile et pauvre (exploitation injuste et irrationnelle des ressources). Et le cycle peut recommencer avec à nouveau l’émergence d’une culture de l’entraide…

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 302 (version brochée).

1.1.7. La sociobiologie, une science ou une pseudo-science ?

Un des plus grands rétropédalages de l’histoire des sciences si toute fois on peut considérer que la sociobiologie soit une science.

En 2007, lorsque la description de ce mécanisme a été publiée, les deux Wilson (David S. et Edward O.) ont trouvé une formule lapidaire pour capter l’essence de cette « nouvelle sociobiologie ». D’un point de vue évolutif, « l’égoïsme supplante l’altruisme au sein des groupes. Les groupes altruistes supplantent les groupes égoïstes. Tout le reste n’est que commentaire ».

L’entraide, l’autre loi de la jungle, Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, page 239 (version brochée).

1.2. La conférence éponyme : Peut-il exister des actions altruistes ?

Du fait de mon intérêt personnel sur les concepts d’entraide, de coopération, d’altruisme, j’ai écouté par deux fois la conférence éponyme animée par Eric Lowen, de l’UPP ALDERAN: « Peut-il exister des actions altruistes ? ».

1.2.1. Lien sur la conférence

1.2.2. Citations extraites de la conférence

Je partage ensuite quelques citations du conférencier extraites de la conférence permettant d’apporter un éclairage sur le café-débat de ce soir.

1.2.2.1. L’altruisme dans nos sociétés, une histoire récente

J’attire votre attention que les sociétés telles que nous les pensons, telles que nous les connaissons, et que donc les interrogations sur l’altruisme, quand on les ramène aux sociétés, on les ramène à quelque chose, (donc les sociétés que nous connaissons), qui ont derrière elles à peu près pas plus de 6 000 ans. L’humanité a derrière elles à peu près 200 000 ans. Donc c’est pour ça qu’il ne faut pas oublier que ce que nous appelons des sociétés sont une invention culturelle dans l’odyssée culturelle de l’humanité qui date de la fin du Néolithique, qui participe d’ailleurs de la sortie du Néolithique et de l’entrée dans les temps historiques. C’est pour ça que l’immense majorité de l’histoire de l’humanité n’est pas du tout liée à une histoire de société. Alors oui, il y avait des groupes humains, il y avait des groupes sociaux si on veut, mais il ne formait pas des sociétés au sens ou ce mot à sens dans les structures que nous connaissons.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 00:05:00)
1.2.2.2. Repenser la notion d’altruisme, notamment l’interprétation des actions altruistes

C’est pour ça que l’objectif de la conférence d’aujourd’hui, pour venir à ce que je vais expliquer, c’est une invitation à repenser la notion d’altruisme, les actions altruistes et surtout à un petit peu réfléchir à ce que nous mettons derrière le mot altruisme. Puisque quand nous pensons la notion d’altruisme, nous y mettons toute une série de notions, de principes. Or, il faudrait se poser la question, est-ce que l’interprétation que nous faisons des actes d’altruisme dans notre espèce que nous pouvons constater, est-ce que l’interprétation que nous en faisons, au sens, ce serait des actions désintéressées de la part des personnes, puisque c’est ça l’idée commune d’altruisme, c’est-à-dire ce que l’on nous dit depuis très longtemps, depuis je ne sais combien de livres de morale, depuis je ne sais combien de philosophes depuis l’Antiquité, à travers les religions, à travers l’éducation, on nous dit qu’une action altruiste, l’altruisme, c’est quand il va y avoir une action qui va être faite de manière désintéressée par une personne à l’égard d’autrui. C’est pour ça, comme je l’ai dit il y a quelques instants, que je ne remets pas en cause l’action qui est menée, mais l’interprétation que nous en donnons dans le sens où cette action serait désintéressée. En fait, ce que je vais essayer de vous expliquer, je vous donne un petit peu la conclusion, c’est qu’en réalité, il n’y a pas d’action désintéressée, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’action altruiste. C’est en fait la question de la motivation qu’il faut réexaminer, et aujourd’hui, justement, nous pouvons réexaminer cette question de la motivation humaine, c’est-à-dire qu’est-ce qui meut les êtres humains, les hommes, les femmes à agir, à faire des choses, en s’appuyant à la fois déjà sur l’expérience commune que nous pouvons avoir de la vie humaine, puisque à ce niveau-là, c’est déjà un terrain d’analyse et de compréhension stratégique, mais aussi tout ce que la psychologie contemporaine nous dit par rapport à ces questions-là.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 00:06:06)
1.2.2.3. L’égoïsme comme opposé à l’altruisme

Dans les poncifs que nous avons aujourd’hui, pour critiquer les défauts de notre modernité, on parle de l’individualisme, on parle donc d’un capitalisme sauvage, etc. Évidemment, on relit ça à quoi ? À l’égoïsme, comme aussi l’opposé de l’altruisme, et aussi on pense de l’altruisme comme étant une solution à ces problèmes. Ou en tout cas, une solution avancée par beaucoup de mouvements, politiques, religieux ou autres, voire philosophiques, à ces problèmes de notre présent.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 00:12:23)
1.2.2.4. Une ontologisation des questions autour de l’altruisme

D’ailleurs, j’attire votre attention que souvent, dans la problématique de ces questions autour de l’altruisme, ce qui fait la difficulté à démêler un petit peu la pelote, c’est que la plupart du temps, on a une ontologisation de la problématique. Moi, depuis le départ, je vous ai parlé d’actions altruistes. Alors que souvent la question va se déplacer, l’homme est-il altruiste ? Ou l’homme est-il égoïste ? Comme si c’était, une fois que l’on met le doigt dessus, une définition stable et permanente et exclusive du fonctionnement de l’être humain.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 00:14:52)
1.2.2.5. L’altruisme et l’idée de l’humanité

Puisque derrière cette question-là, c’est l’idée même de l’humanité qui est en jeu. Quelle idée de l’humanité vous avez à l’esprit ? Cette question de l’altruisme participe de l’idée que l’on se fait de l’humanité, c’est-à-dire soit on considère qu’il n’y a pas d’altruisme possible dans l’humanité, donc ça va donner une certaine conception de l’être humain, du fonctionnement social, des rapports de force. Ou au contraire, si on pense qu’il peut y avoir des actions altruistes, eh bien on va avoir une autre conception de l’homme, et puis va se poser la question, si on pense qu’il y a des actions altruistes, ces actions altruistes, elles proviennent finalement de quoi ? Est-ce que par exemple c’est acquis, ou est-ce que c’est un instinct ? A ton besoin d’une éducation à l’altruisme, à la générosité, à la solidarité, ou est-ce que ça viendrait spontanément ?

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 00:19:17)
1.2.2.6. Cinq formes d’altruisme dans notre espèce

Dans le cas du fonctionnement de l’Homo sapiens, dans notre espèce, il n’existe pas un altruisme, mais plusieurs altruismes. C’est-à-dire qu’on peut s’apercevoir qu’il y a différentes formes d’altruisme, alors il y en a 5 classiquement. Alors ils ne sont pas toujours dénommés comme tels par les gens qui travaillent sur ces questions-là, c’est pour ça que les dénominations que je vais vous proposer sont des dénominations qui me sont personnelles, c’est-à-dire que je les ai considérées comme plus explicatives que certaines qui étaient utilisées […]

(Les cinq formes d’altruisme citées dans la conférence avec des exemples sont l’altruisme d’affectivité, l’altruisme de réciprocité, l’altruisme de proximité, l’altruisme de réciprocité indirecte (réputation) et l’altruisme de gratification.)

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 00:55:29)
1.2.2.7. Origine des actions et le rapport à son intérêt

On n’agit pas en fonction de son intérêt mais en vertu de ce qu’on pense être son intérêt, et cela à tort ou à raison.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 01:21:09)
1.2.2.8. Le désintéressement est une illusion

On peut considérer que la notion de désintéressement que nous associons à l’altruisme est en fait une illusion.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 01:25:16)
1.2.2.9. L’altruisme est une propriété émergente de l’évolution humaine

L’altruisme est une propriété émergente de l’évolution humaine, produite par l’hominisation, c’est-à-dire que plus il y a eu l’hominisation, plus nous avons développé la capacité à coopérer, à faire preuve de solidarité, à faire preuve d’altruisme.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 01:42:28)
1.2.2.10. Une invitation à un décillement sur l’interprétation des actions altruistes

Ce que je vous invite à retenir pour la conclusion, en plus de ce que je viens de vous présenter, c’est une sorte de désillusion. Je vous invite en fait à une désillusion idéaliste qui remet en cause, non pas nos actions altruistes, puisque par ailleurs je vous invite à faire preuve d’altruisme. Ce que je vous invite en fait à remettre en cause, ce sont les images romantiques quant à la question de l’altruisme c’est-à-dire des images d’une naïveté extrême par rapport à l’altruisme, par rapport au désintéressement de l’homme. Évidemment ce décillement par rapport à la réalité de l’homme, par rapport à la réalité de ce que nous sommes remet aussi en cause bien des philosophies qui ont développé, ce que moi je vais appeler des romans du devoir, comme par exemple dans la philosophie kantienne, mais on peut aussi retrouver de tels principes du côté de certaines philosophies antiques, par exemple comme dans le stoïcisme. Bien évidemment, quand je vous invite là à cette désillusion, ce n’est pas pour arrêter de faire preuve d’altruisme mais comme je l’ai dit pour, au contraire, peut-être mieux assumer, mieux comprendre, mieux vivre l’altruisme sur le plan intérieur comme sur le plan extérieur.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 01:46:00)
1.2.2.11. Pouvoir cultiver un altruisme déniaisé

L’altruisme existe bien sur le plan intérieur comme sur le plan extérieur donc on peut garder le terme d’altruisme ; on peut garder le mot d’altruisme, il faut simplement le penser comme, non pas antinomique à la notion d’intérêt, comme étant l’opposé de l’égoïsme, mais comme étant, comme je vous l’ai dit, une logique de coopération sociale entre individus, qui reste bien par ailleurs égoïste, comme dans le contrat social, et, non seulement l’altruisme existe bien, a bien une réalité mais on peut considérer que c’est un des moteurs de l’évolution humaine, c’est un des moteurs, c’est pas le seul mais c’est un des moteurs de l’odyssée culturelle de l’humanité et que, finalement, nous avons tous, quand nous comprenons cela, un intérêt, bien compris au sens rationnel et objectif, à cultiver l’altruisme, un altruisme évidemment élargi, réfléchi, déniaisé mais bien à cultiver l’altruisme.

Eric Lowen, UPP ALDERAN, conférence Peut-il exister des actions altruistes ?, (cf. 01:47:38)

1.3. Mes intérêts et questions personnelles en rapport avec le thème de ce débat

  • N’existe-t-il pas une démonstration, des preuves quant à l’entraide, la coopération sur la compétition ?
  • Comme dit aussi dans le livre L’entraide, l’autre loi de la jungle (voir le premier paragraphe), on peut considérer que le paradigme social (sociétal ?) actuel est proche des slogans suivants : « Que le meilleur gagne ! », « La loi du plus fort est toujours la meilleure. » ou encore en anglais « Might makes right. ». Ne pourrait-on pas les changer en celui-ci : « Si une personne perd, tout le monde perd » ? Il ne s’agit pas d’un souhait naïf ou inconsidéré. Voir par exemple l’histoire du jeu Monopoly avec l’invention de The Landlord’s Game par l’Américaine Elizabeth Magie. Il s’agit d’une question de société à la fois individuelle et collective où l’altruisme a à mon sens son importance.
  • Peut-on faire de l’altruisme un projet politique comme le libéralisme favorise « l’individualisme gagnant » ? (Cela a été fait mais ne l’aurait-on pas « oublié » ?).
  • Que penser de la sociobiologie et son credo « l’égoïsme supplante l’altruisme au sein des groupes. Les groupes altruistes supplantent les groupes égoïstes. Tout le reste n’est que commentaire » ? Quelle est la nature des groupes concernée par leurs travaux ? L’annexe intitulée De la « nouvelle sociobiologie » du livre L’entraide, l’autre loi de la jungle, page 311 apporte des éléments de réponse mais la question de la validité des travaux et de leur valeur scientifique demeure ouverte.
  • L’intérêt personnel peut-il parvenir à favoriser un groupe au détriment d’un autre groupe ?

2. Durant le débat

2.1. Définitions autour de la notion d’altruisme

Durant le débat, j’ai partagé deux définitions personnelles, celle de l’altruisme et de l’égoïsme que j’ai tricotées à partir de mon expérience et de mes diverses lectures.

2.1.1. Définition personnelle de l’altruisme

Acte au bénéfice non exclusif d’autrui avec une mutualisation des deux intérêts, son intérêt personnel et celui d’autrui.

Définition personnelle de l’altruisme, Sonia Kanclerski, Pause-café chez Sonia, article Peut-il exister des actions altruistes ?, 16 décembre 2024.

2.1.2. Définition de l’altruisme selon Wikipédia

Le mot altruisme et l’adjectif altruiste s’appliquent aujourd’hui à un comportement caractérisé à s’intéresser et à se dévouer à autrui, ne procurant pas d’avantages apparents et immédiats à l’individu qui les exécute mais qui sont bénéfiques à d’autres individus et peuvent favoriser surtout à long terme un vivre-ensemble et une reconnaissance mutuelle au sein du groupe où il est présent, bien que l’altruisme brut soit néanmoins un acte ne demandant rien en retour. Le terme « altruisme » est employé pour la première fois par Auguste Comte.

Définition de l’altruisme selon Wikipédia, 16 décembre 2024.

2.1.3. Définition de l’altruisme selon Larousse

altruisme
nom masculin
(du latin alter, autre, avec influence de égoïsme)
Disposition de caractère qui pousse à s’intéresser aux autres, à se montrer désintéressé (par opposition à égoïsme)

Définition de l’altruisme par le dictionnaire Larousse, 16 décembre 2024.

2.1.4. Définition personnelle de l’égoïsme

Acte au bénéfice de soi et au détriment d’autrui.

Définition personnelle de l’égoïsme, Sonia Kanclerski, Pause-café chez Sonia, article Peut-il exister des actions altruistes ?, 16 décembre 2024.

2.1.5. Définition de l’empathie selon Carl Rogers

L’empathie consiste à saisir avec autant d’exactitude que possible, les références internes et les composantes émotionnelles d’une autre personne et à les comprendre comme si l’on était cette autre personne. Sans jamais perdre de vue le ‘comme si’.

Carl Rogers

Pour en savoir plus sur l’empathie, lire le paragraphe sur l’empathie de l’article du blog Le développement de la personne.

2.2. Idées et réflexions explorées durant le débat

Parmi les notes prises durant la soirée, j’écris en vrac les points suivants :

  • Les concepts et idées suivantes ont été mentionnées : altruisme, égoïsme, motivation, intérêt, intéressement, entraide, coopération, mutualisme, solidarité, empathie accompagnées par le duo personne, individualité / groupe, collectif.
  • Le mot altruisme a été créé par le philosophe Auguste Comte dans son ouvrage Catéchisme positiviste (1852).
  • Il est difficile de savoir l’origine d’une action d’une personne, y compris pour la personne elle-même (exemple cité : don du sang).
  • Faire une action altruiste contribue à valider ses propres valeurs, sa propre éthique, ce qui constitue un intéressement.
  • La problématique de la signification du mot aide pour une personne : un service ponctuel, la résolution unitaire d’un problème, de l’assistanat ou bien une aide jusqu’à l’obtention de l’autonomie (symbolisée par la citation ci-dessous) ?

Donne un poisson à un homme et tu le nourris pour un jour, apprends-lui à pêcher, et tu le nourris pour toujours.

Lao Tseu
  • L’altruisme est l’objet de recherches scientifiques pour savoir si son origine ne serait pas génétique par exemple.
  • Le gène égoïste de Richard Dawkins.
  • Le solidarisme et Léon Bourgeois.
  • L’altruisme ne doit pas être associé à la morale, provoquant des injonctions à agir.
  • L’altruisme est garant du lien social.
  • L’altruisme peut servir à embellir son image.
  • L’altruisme peut être vu comme de l’amour interpersonnel (amour parental, relation amoureuse)..
  • Les travaux de la sociobiologie sont à prendre avec des pincettes car il s’agit d’une discipline controversée, vivement critiquée.
  • Une distinction est à faire entre l’altruisme et la coopération contribuant à la survie dans le cadre de la théorie de l’évolution. Ainsi, utiliser la notion de groupe altruiste ou d’intérêt groupal est discutable, critiquable car les espèces n’existent pas, seuls les individus existent. D’où les réserves sur la sociobiologie sur les comportements de groupes.
  • L’empathie a un rôle primordial dans les actions altruistes.
  • Faire preuve d’altruisme est aussi une manière de reconnaître l’autre en tant que personne : autrui est une autre personne que moi. Aider autrui est donc aussi s’aider soi.
  • On peut distinguer cinq formes d’altruisme : l’altruisme d’affectivité, l’altruisme de réciprocité, l’altruisme de proximité, l’altruisme de réciprocité indirecte (réputation) et l’altruisme de gratification (sources : L’entraide, l’autre loi de la jungle et la conférence éponyme).
  • Le rôle et l’importance des motivations et des intérêts personnels dans les actions d’une personne.
  • Faire une action à son bénéfice personnel n’est pas de l’égoïsme, c’est quand cette action se fait aussi au détriment d’autrui.

2.3. Ma réponse personnelle à la question

A la question posée par le débat de ce soir, je réponds :

Peut-il exister des actions altruistes ? Oui, il peut exister des actions altruistes mais les motivations de ces actions ne sont pas altruistes mais intéressées.

Sonia Kanclerski, Pause-café chez Sonia, article Peut-il exister des actions altruistes ?, 16 décembre 2024.

Conclusion

Ce que je retiens personnellement du café-débat : le désintéressement dans les actions altruistes est une illusion. Des actions purement altruistes n’existent pas. Un mot-clé de ce café-débat est le mot intérêt auquel on peut ajouter l’adjectif qualificatif personnel. L’intérêt personnel. La réalité, l’existence des actions altruistes ne sont pas à remettre en cause mais leur interprétation doit être examinée, évaluée pour ne pas tomber dans une illusion idéaliste et ainsi mieux appréhender et vivre l’altruisme dans les rapports à soi et au monde.

Après le café, une bifurcation vers les limites de la démocratie

La fin du café n’a pas marqué la fin de la session zoom ; la soirée s’est poursuivie avec des réflexions et autres questions en lien plus ou moins connexes avec le thème du café-débat du soir. Une pensée en entraînant une autre, les réflexions des participant·es ont bifurqué sur le rôle de l’altruisme dans une société vers les limites de la démocratie. Penser l’élection dans une démocratie comme un arbitrage.

Ce qui fait que je suis allée me coucher avec ce type de questionnement en tête : « Que faire pour que la démocratie perdure, que l’élection demeure un arbitrage et non l’expression d’un rapport de force : l’arbitraire du pouvoir ? Quelle est la marge de manœuvre d’un·e citoyen·ne dans une démocratie (pour lutter contre la « fascisation », contre l’arbitraire) ? ». Pour mon plus grand plaisir ☀️

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