Oui, tous les hommes !

Dans une des démocraties du monde, les urnes ont parlé et le message est limpide. Toutes les réactions suite au résultat, surtout des hommes, aussi. Pourquoi réagir ? Quel lien avec moi ? Mon sexe en tant que personne. Parmi les réactions, j’ai été particulièrement choquée par une vidéo partagée dans les réseaux sociaux où un homme fêtait les résultats de cette élection présidentielle à sa façon. Voyez et écoutez plutôt :

Voici la retranscription de la vidéo :

Hey bitch, we control your bodies.
Guess what, guys win again.
You will never control your own bodies.
Your body, our choice.
Cet influenceur masculiniste célèbre le score de Trump le soir de l'élection présidentielle américaine.
The feel when you're totally not pressed.
The feel when we control your bodies.
Hey bitch, we control your bodies.
Guess what, guys win again, okay?
Men win again.
And yes, we control your bodies.
Hi, I'm your Republican Congressman.
(Rires)
Hi, I'm your Republican Congressman.
It's your body, my choice.
And men win again, men win again.
They will never ever be a female president.
Never, they will never be a female president ever.
It's over.
Glass ceiling, dude, it's a ceiling made of fucking bricks.
You will never break it.
Your stupid face keeps hitting the brick ceiling.
We will keep you down forever.
You will never control your own bodies.
You will never be the president of the global empire.
Never gonna happen, sweetie.
Your body, our choice.

Traduction en français :
Hé salope, nous contrôlons vos corps.
Devine quoi, les gars, ils ont encore gagné.
Tu ne contrôleras jamais ton propre corps.
Ton corps, notre choix.
La sensation que l'on ressent quand on n'est absolument pas sous pression.
La sensation que l'on ressent quand on contrôle votre corps.
Hé salope, on contrôle votre corps.
Devine quoi, les mecs ont encore gagné, ok ?
Les hommes ont encore gagné.
Et oui, on contrôle votre corps.
Salut, je suis votre député républicain.
(Rires)
Salut, je suis votre député républicain.
C'est ton corps, mon choix.
Et les hommes gagnent encore, les hommes gagnent encore.
Elles ne seront jamais une femme présidente.
Jamais, elles ne seront jamais une femme présidente.
C'est fini.
Le plafond de verre, c'est un plafond fait de putains de briques.
Tu ne le briseras jamais.
Ton stupide visage n'arrête pas de heurter le plafond de briques.
Nous te garderons à terre pour toujours.
Tu ne contrôleras jamais ton propre corps.
Tu ne seras jamais la présidente de l'empire mondial.
Ça n'arrivera jamais, chérie.
Ton corps, mon choix.

Nicolas Fuentes, 26 ans, est un ancien YouTubeur et streamer américain. Il a été banni des plateformes en 2020 à cause de ses propos misogynes, racistes et antisémites. Il a fait l'éloge d'Hitler, déclarer que l'homosexualité devrait être illégale ou encore que les femmes ne devraient pas avoir le droit de vote. Il a aussi participé à des rassemblements qui ont mené à l'attaque du Capitole en janvier 2021. Il avait été banni de Twitter, mais Elon Musk a rétabli son compte où il est toujours admiré par les masculinistes et les suprémacistes.

Trop, c’est trop ! Et j’ai donc décidé de prendre mon clavier et d’écrire quelques mots pour partager mon indignation et exprimer ma vive inquiétude en tant que femme. Je ne suis pas Américaine. Je suis Française mais je me sens concernée, touchée par ce qu’il vient de se passer aux États-Unis. Je prends les résultats de cette élection comme une magistrale gifle, pire un coup de poing dans le ventre. Au XXIe siècle, les hommes ne sont toujours pas prêts à élire une femme présidente. Si uniquement les femmes avaient voté, Kamala Harris auraient remporté l’élection, …mais il y a aussi les hommes dans l’électorat.

Et puis, au-delà du résultat, la réaction des hommes interroge. De tous les hommes. J’ai tapé au clavier 6 lettres h, o, m, m, e, s. Je me demande si le mot est exact, s’il est adéquat. En effet, les résultats clairs et nets en faveur du candidat Donald Trump et après les résultats être témoin d’un tel affichage de masculinité toxique, de virilisme puant, de comportements nauséabonds, destructeurs pour la moitié de humanité, est-ce là être un homme au XXIe siècle ? Visiblement, cela ne dérange pas assez d’hommes. Cela leur convient politiquement en masse. Si de petites voix masculines “pas moi” s’élèvent, à côté, les autres voix sont donc clairement majoritaires !

L’élection de Donald Trump convient politiquement aux hommes, en masse.

Sonia Kanclerski, Pause-café chez Sonia, article Oui, tous les hommes !, 11/11/2024.

D’où le fait que je me sente concernée car nous retrouvons cette problématique dans beaucoup de pays dans le monde, la France incluse. Donc, si des hommes venaient la main sur le cœur, “pas moi, moi je suis gentil”, eh bien, cela ne changerait absolument rien pour noues. Ce genre de situation s’est produite bien des fois dans le passé comme l’obtention du droit des femmes à voter, à devenir des citoyennes à part entière. Ma première réaction personnelle, c’est donc : “vous vous foutez de notre gueule, absolument tous mais pas de la même manière !”. Vous prétendez nous aimer, nous respecter. Et pourtant une majorité d’électeurs (masculin exclusif) d’un pays démocratique, le troisième pays le plus peuplé du monde, préfèrent voter en pleine conscience pour un candidat ouvertement sexiste, raciste, homophobe : que devons-noues comprendre ?

Tous les bilans ou états des lieux peuvent être fait sur le sexisme ; noues pouvons hurler notre douleur avec le hashtag #meetoo ; des actions (mesurettes ?) sur l’égalité femmes-hommes peuvent être mises en place ; mais finalement on peut objectivement affirmer que c’est donc… du vent, de la poudre aux yeux, du pipeau. Beaucoup de femmes, pas uniquement moi, sont donc humiliées, ridiculisées, méprisées. Félicitations ! En effet, vous avez gagné ! Quoi au juste ? Notre silence, notre renonciation, notre soumission ? Certainement pas. Notre colère, notre détermination, notre riposte, assurément. Qui sommes-noues pour vous ? Maintenant, la réponse est limpide et cinglante. Les masques tombent. Noues ne valons rien. Noues ne sommes pas des personnes. Noues sommes personne. Ah si ! Pour les hommes au pouvoir, j’ai trouvé : des incubatrices pour futurs mâles, de préférence ? Pour les hommes qui auront le réflexe de répondre par la négative, l’Histoire des faits montre pourtant qu’il s’agit là d’une affirmation.

Oubliez donc le costume de Superman, la cape de Zorro ou le sabre laser de Luke Skywalker ! Oubliez aussi votre appendice du bas. Pensez plutôt à utiliser votre tête et votre cœur, si vous en avez, et rien n’est moins sûr. Si j’aime mon mari et suis heureuse avec lui, je peux écrire sans faute et crier de douleur : vous ne noues méritez pas ! Si vous écoutez et interprétez ces propos comme de la misandrie, c’est de votre responsabilité, pas la mienne ! D’ailleurs, je ne vous remercie pas pour ressentir cette dissonance factuelle.

A noter que quoi vous puissiez faire, vous devez comprendre messieurs que vous ne pouvez que réparer, réhabiliter les injustices sexistes. Vous ne pourrez jamais les effacer car ces violences masculines perpétrées contre les femmes dans le contexte de la construction du vivre-ensemble au sein d’une société sont une tache indélébile pour l’éternité. Comme par exemple le fait que les femmes ont dû lutter âprement pour obtenir tous leurs droits ; parmi eux : le droit à l’éducation, le droit à la contraception, le droit à l’IVG, le droit de vote, qui sont d’ailleurs encore loin d’être acquis dans tous les pays du monde et qui sont grandement menacés partout où ils ont été acquis au moins une fois.

Alors, messieurs, je vous le demande : comment, dans ces conditions, envisager de construire une relation de confiance, une relation professionnelle, une relation d’amitié, une relation amoureuse ? Comment prendre la responsabilité de devenir mère, question écrite par une mère de deux enfants ? Comment faire confiance aux hommes ? Ai-je seulement le droit d’avoir mal d’écouter les hommes parler de réarmement démographique ? Comment osez-vous messieurs soit le demander, soit laisser les hommes avoir cette possibilité ?

Donc, encore une fois : oui, tous les hommes ! Honte à vous !