La non-violence, jusqu’où ?
La non-violence, jusqu’où ?
La non-violence, jusqu’où ?

Crédits

Une sculpture représentant la non-violence à Malmö en Suède.

🔗 susisorglos089. Creative Commons CC0.

La non-violence, jusqu’où ?


Café philo Victor Schoelcher
Source du logo : 🔗 https://www.alderan-philo.org/cafe-philo-de-toulouse/
ThèmeLa non-violence, jusqu’où ?
AnimationAssociation ALDERAN
LieuLa brasserie Le Déli’s à Toulouse
Date et horairesle mardi 23 avril 2013 de 20 h 30 à 22 h 30
Mots-clésapologie, café, communication, construction, débat, émotion, limites, origine, violence
Information Je suis adhérente de l’association ALDERAN à Toulouse. Pour plus de détails, voir la page sur le café philo Victor Schoelcher.

1. Mon intérêt personnel

Depuis quelques temps, j’aime sortir et participer aux cafés philo à Toulouse pour apporter ma contribution personnelle en tant que citoyenne du monde. Cela fait déjà plusieurs cafés que je fais et cette soirée reste pour moi inoubliable pour le contenu et les émotions ressenties. Je les partage avec vous maintenant. Mon intérêt principal est le thème ; je m’interroge sur comment le thème sera traité, le comportement des gens et je me suis lancée une sorte de défi : ne pas prendre la parole durant toute la soirée, rester silencieuse et seulement écouter, ce qui est une action 🙂

Écouter n’est pas se taire et pas non plus s’enterrer.

Sonia Kanclerski, Pause-café chez Sonia, Café philo La non-violence, jusqu’où ?, avril 2013.

Pour information, pour ce débat philosophique, la salle était comble.

2. Quelques notes personnelles

Durant le débat, j’ai écrit quelques notes sur un cahier personnel, un Clairefontaine rouge, une sorte de journal de bord sur le contenu de certaines sorties culturelles… Et plusieurs notes me font frémir…

En introduction du débat :

  • L’animateur va aborder la non-violence comme une éthique morale, plutôt positive, vertueuse pour l’individu et va inviter les participants au café à s’interroger cette approche, ce comportement à l’échelle du groupe dans la société. Le principe vertueux est-il toujours valable ?
  • Le thème du débat fait penser à Gandhi et son combat pour l’émancipation de l’Inde par rapport au Royaume-Uni. Est-ce une référence morale acceptable ?

Durant le débat, j’ai noté quelques réponses des participants (dont la prise de parole était régulée par la méthode SOPHIA). Je les retranscris dans cet article telles que je les ai comprises et que je les comprends dans cet ici et maintenant :

  • “Jusqu’à nulle part ! On désarme tous les opprimés !”
  • La violence est en nous ! On n’y peut rien car elle est de nature biologique. Elle éclate selon les circonstances.”
  • “C’est comme la tolérance… La limite : jusqu’à l’intolérance… qui va faire s’exprimer la violence.”
  • “La violence est partout, elle n’a pas de limites. C’est pour cela que toutes les sociétés du monde ont créé des lois pour la réguler. On ne peut pas l’éviter. On est violent donc la question devrait être ‘Jusqu’où peut-on être pacifique ?’. Doit-on risquer la mort pour éviter la violence ?”
  • “On peut comprendre la non-violence comme une résistance à la violence. Mais ne rien faire est une forme de violence. Quelles limites à l’inaction ?”
  • “Lorsque l’on reçoit une gifle sur une joue, doit-on présenter l’autre joue ? On a le droit de présenter un autre visage et ne pas se réfugier dans la passivité.”
  • La non-violence est un pouvoir car elle met en lumière. Pour inviter à une prise de conscience. C’est un pouvoir médiatique. Les manifestations du 1er mai, la désobéissance civile en Inde avec Gandhi, la position politique de Nelson Mandela.”
  • “La non-violence, c’est dur car il faut être fort d’esprit et seule une minorité de personnes peut l’appliquer. Le faible d’esprit utilisera inévitablement la violence car c’est plus facile. La non-violence n’existe donc pas. A noter, la violence psychologique est plus dure que la violence physique sur la durée. C’est une mort à petit feu.”
  • Derrière toute violence se cache la peur. Quid de la communication non violente ? Est-ce qu’elle marche ? Difficile de ne pas tomber dans la violence dans notre expression : langue, comportement. La violence est naturelle. La non-violence demande de l’effort, de l’attention. La violence est fascinante. Il faut voir la passion pour les faits divers qui ont du succès à être lus dans les journaux.”
  • “La non-violence est une réponse, une méthode à utiliser jusqu’à la fin de son efficacité.”
  • “L’émotion est plus forte que la raison.”
  • “Le thème du débat pose la question d’un rapport de force. Le sacrifice est aussi une grande violence.”
  • Au bout d’un moment, on est obligé d’être violent. Les limites sont atteintes quand les valeurs humaines ne sont pas respectées. Il faut montrer de la fermeté lorsqu’il y a de l’irrespect. Pour atteindre l’objectif de non-violence, il y a donc un long chemin de transformation à faire.”
  • “La violence commence quand on montre de l’agressivité.”
  • “C’est une question de respect de soi et de l’autre.”
  • La violence, c’est hyper efficace. Il suffit de prendre pour exemples le Tibet et la Birmanie. L’attitude de non-violence des Tibétains a mené à leur génocide. Et pour la Birmanie, les dictatures militaires font la loi et dirigent le pays.”
  • “Il faut pouvoir apprendre sa propre violence pour ne pas la reproduire sous une autre forme. C’est un travail quotidien et personnel et non collectif.”
  • “C’est un phénomène engendrant.”
  • “L’homme est à 50 % violent et à 50 % d’amour. Un exemple : la centrale nucléaire, elle n’est pas fiable et sûre à 100 %. L’homme, c’est pareil. Il ne peut pas être à 100 % non violent. C’est aussi pour cela qu’il existe des organisations terroristes armées comme l’ETA.”
  • “La non-violence, c’est une forme de violence mais cachée.”
  • “Il ne faut pas voir la violence comme quelque chose qui arrive uniquement dans l’émotion. Elle peut être pensée, organisée, planifiée. Ne pas la réduire uniquement à de la brutalité.”
  • “La torture est une forme de violence pour l’individu.”
  • “Il faut être méchant parfois.”
  • “La violence est biologique et universelle. Elle pose donc la question de la responsabilité de l’individu et donc son irresponsabilité.”
  • “La gifle, cela permet quelquefois de réveiller les autres.”
  • “La violence, c’est se sentir vivant, se faire remarquer. C’est l’expression de la domination.”
  • “On a le droit à la légitime défense quand on est attaqué. On a donc le droit d’utiliser la violence. La limite, c’est la non-assistance à personne en danger.”
  • “Le bébé naît dans un bouillonnement de violence. C’est tout le travail de la culture et de son éducation qui permet de déconstruire sa violence.”
  • “La violence, c’est la raison du plus fort.”
  • “Ne jamais lutter contre les personnes. La limite est le toucher, le contact avec la personne.”
  • “Le bébé naît non violent, c’est après qu’elle arrive.”

En conclusion du débat :

  • L’animateur va inviter à une ouverture, à un questionnement sur l’efficacité de la non-violence.
  • La responsabilité d’utiliser cette méthode est-elle éthique et morale ?
  • Elle pose la question de la protection : comment se protéger efficacement ? Pour une personne ? Pour un groupe ?
  • L’efficacité et l’éthique sont discutables mais il faut voir les enjeux. Pour les idéaux politiques de Nelson Mandela et Gandhi, la méthode a plutôt été efficace. Pour le Dalaï-Lama au Tibet, c’est plutôt un échec : aucune pression sur la Chine. De l’importance de l’opinion publique pour obtenir un résultat.
  • Pouvoir mesurer l’efficacité de la non-violence sur la durée et sur la limite. Assumer cette limite au niveau de l’individu.

3. Mes émotions

  • Je suis sortie de la salle de la brasserie sonnée, choquée par le débat. C’est à ce jour le seul café philo qui m’a mis dans un tel état…
  • J’ai eu la forte désagréable sensation qu’au fil de la progression du débat on faisait l’apologie de la violence… On avait donc transformé progressivement le thème du café philo en un nouveau : ‘la violence, à partir d’où ?’. Juste insupportable.
  • (Sur le ton de l’ironie) Tout va très bien dans notre société… Ce n’est pas possible ! Ils ont trollé. Ils ont fumé la moquette. C’est la fin du monde !
  • La communication non violente ? Super… Quid des autres formes d’expression et de communication ? Etre juste soi et respectueux des personnes n’est pas suffisant ?
  • Je sens que je vais prendre une douche froide en rentrant… Non. Trop tard. C’est déjà fait !
  • J’ai respecté mon engagement personnel à ne pas prendre la parole. J’étais dans l’action d’écoute. Mes oreilles ont bien reçu les différentes interventions. Pour l’accueil dans ma tête, c’est autre chose. Sans commentaire ou avec tous les commentaires du monde.
  • Dois-je être rassurée, tranquille, sereine après cette écoute ? Waouh ! Je ne préfère pas savoir ce que pensent les personnes qui ne prennent pas le temps de se poser… pour se poser la question… Soupirs.
  • Un échange avec une participante du café :

De mémoire :

– Ce n’est pas possible ce débat ?! Tous des papis !

(J’acquièse)

– Ce n’est pas gentil pour les papis. Oui, c’était terrible à écouter…

Sonia Kanclerski, Pause-café chez Sonia, Café philo La non-violence, jusqu’où ?, avril 2013.
  • J’ai quitté la brasserie et le centre-ville de Toulouse particulièrement énervée, remontée comme un coucou suisse (et ce n’est pas flatteur pour le coucou), à tel point que j’ai décidé pour rentrer à mon domicile de prendre le périphérique à l’envers (ce qui fait rallonger le trajet d’une bonne demi-heure de route), mais c’était le prendre à l’endroit pour moi ce soir-là… Je vous assure. Sourire amer.

4. Mon regard personnel

Je présente brièvement ici quelques réflexions personnelles sur le thème du débat, qui n’engagent que moi.

  • La violence est une construction sociale et dépend de l’éducation et de l’environnement dans lesquels un être humain grandit et vit sa vie. Elle est donc à déconstruire. Pas à détruire car on doit savoir comment elle s’est construite. Quiconque oublie son histoire est condamné à la reproduire.
  • Pour se convaincre de la nature non biologique de la violence, il suffit de consulter les statistiques de la criminalité dans différents pays. Si elle était d’origine biologique, on noterait une certaine homogénéité, une certaine corrélation dans les chiffres et ce n’est pas le cas. C’est donc un (mauvais) phénomène social construit. Voici un article Wikipédia sur la question : Classement des pays par taux d’homicide volontaire.
  • J’ai en tête un article sur un communiqué de la police islandaise (qui m’a marquée) où elle avait dû abattre pour la première fois de son histoire un forcené pour trouble sévère à l’ordre public. Voici un lien sur l’article du journal Le monde : La police islandaise tire pour la première fois sur un homme et le tue.
  • Il existe des pays, des groupes sociaux dans le monde où la violence, la criminalité sont moindres car la culture du viol y est absente.
  • Tout comportement violent est à proscrire car il est néfaste pour la santé, l’intégrité des personnes et est une sévère entrave à son développement. Il est aussi inutile… Une réflexion personnelle pour illustrer le propos : “On n’est pas d’accord avant, on sera donc encore plus d’accord après (l’acte de violence).”. Ironie.

Avec l’envie de partager,
Sonia Kanclerski

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